L’Agence Nationale de l’Assistance Juridique et Judicaire (ANAJJ) en collaboration avec le Haut-Commissariat de Nations Unies aux Droits de l’Homme a organisé du 27 au 28 Novembre 2023, dans la salle de réunion de l’hôtel HIGH CLASS de Zinder, un atelier de vulgarisation

du Guide sur le mécanisme de plainte et de référencement des victimes des violations des droits de l’homme commises par les forces de sécurité intérieures.

L’atelier a regroupé une trentaine de participants composés du consultant, des représentants de l’ANAJJ, du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, des représentants des organisations de la société civile, des FDS, du ministère de la promotion de la femme et protection de l’Enfant des régions de Diffa et Zinder.

La cérémonie d’ouverture

L’ouverture des travaux de cet atelier a été marquée par le discours de la Directrice Générale de l’ANAJJ, Mme Rabiou Assétou Traoré. Dans son intervention, elle a rappelé le contexte ayant motivé l’élaboration du guide notamment la situation sécuritaire où les violations de droits de l’homme sont devenues quasi quotidiennes malgré les conventions signées par nos Etats. Elle a aussi évoqué les mécanismes de réponse mis en place par les autorités tout en rappelant les violations commises par les FDS. C’est dans cette optique que l’ANAJJ a élaboré le guide pour mieux protéger les populations lors des opérations. Après le discours d’ouverture, il a été procédé à la présentation des participants et à la validation de l’agenda de l’Atelier. La cérémonie d’ouverture a été clôturée par une photo de famille.

 La présentation du guide

les définitions de concepts

 Les travaux de la première journée ont commencé par la présentation des 4 parties du guide par le consultant, Monsieur ZAKARI YAOU conformément à l’agenda de l’atelier. Après un bref rappel sur l’historique du guide, le consultant a exposé la première partie du Guide qui porte sur la définition des concepts, afin de permettre aux participants de s’imprégner de ces notions. Il s’agit entre autres des notions de victimes, de recours individuel, de maintien de l’ordre, de la sommation, arrestation arbitraire, plainte, état d’urgence etc.  Après cette présentation, des questions de clarification ont été posées par les participants notamment autour des points suivants : :

  • les tortures infligées par les policiers lors de contrôles : lors des arrestations, les FDS insultent et violentent souvent les personnes mises en cause. A ce niveau, le consultant souligne que les FDS doivent travailler avec professionnalisme en veillant au respect des droits de l’homme ;
  • la différence entre OPJ des FDS et OPJ administratifs : la différence réside dans les taches. Les premiers relèvent des unités d’enquête alors les second relèvent de l’administration ;
  • le concept d’arrestation arbitraire : c’est une interpellation exécutée sans une base légale, sans mandat d’arrêt par exemple  ;
  • La poursuite lors d’un contrôle de police : c’est une attitude à banir, ce n’est pas professionnel et ça comporte des risques inutiles pour les agents

la procédure de recours et les institutions nationales de référence

La deuxième partie a porté sur la procédure de recours et les institutions nationales de référence. A ce niveau, les différentes institutions ont été présentées à savoir l’inspection générale de service de sécurité, l’inspection générale des armés, la CNDH, l’ANAJJ. Ces instances ont pour rôle de réglementer les activités de sécurité ainsi que le fonctionnement et le contrôle du comportement des agents du terrain. Les échanges ont porté sur les points suivants :

  • Insuffisance des informations pour les FDS en matière de saisine ;
  • Les violences sexuelles commises par les FDS sur les enfants. A ce niveau, les débats ont aussi porté sur la diligence faite pour les FDS en cas de saisine. L’analphabétisme de la population est un handicap dans la dénonciation des violations de droits de l’homme perpétrées par les FDS sur les jeunes filles et aussi le manque de contrôle parentale qui expose les enfants à toutes sortes de danger ;
  • La lenteur judicaire et sa mise en cause par les justiciables. Le consultant a expliqué que la justice applique les lois mais elle ne fait pas les lois. Il faut pousser les recherches pour comprendre le fonctionnement de la justice nigérienne ajoute-il. La société civile doit faire un effort de compréhension des mécanismes judicaires pour éviter de tomber dans les erreurs afin de bien faire son travail ; de s’assurer sur les valeurs et l’importance des textes ; de connaitre comment les lois sont appliquées. Par ailleurs pour établir une justice équitable, il faut que tous les citoyens soient égaux devant la loi : enlever toutes les immunités pour les hautes personnalités mais également adapter les textes juridiques à nos réalités.

les procédures de recours internationaux et les institutions de référence

La troisième partie a porté sur les procédures de recours internationaux et les institutions de référence. Les points suivants ont fait l’objet de discussion :

  • la limite de la cour de justice de la CEDEAO du fait de manque de moyen pour exercer ses fonctions :
  • le refus d’exécuter les textes par les Etats ;
  • la question des arrangements dans les affaires pénales par les acteurs de la chaine pénale;
  • la mise à la disposition sans indices d’une vague d’arrestations à l’OPJ par l’armée constitue une difficulté dans le traitement de ses dossiers. La justice est obligée de classer les dossiers sans indices. Déférer les cas avec indices facilite le travail.

Les droits des victimes à une réponse en adéquation avec leurs besoins

La quatrième partie est relative aux droits des victimes à une réponse en adéquation avec leurs besoins. Après présentation, plusieurs échanges ont eu lieu et ont porté sur :

  • le manque de professionnalisme constaté chez certains agents ( FDS) dans l’exercice de leur fonction;
  • la collaboration entre la justice et les autres services doit être étroite afin que celle-ci fasse un bon travail et évite la lenteur dans le traitement des dossiers. A titre illustratif, certains examens médicaux ne sont pas délivrés à temps à la justice comme l’expertise médicale pour poursuivre le traitement des dossiers judiciaires ;
  • La collaboration entre les FDS : il existe une réticence dans la recherche des informations avec les autres corps. Dans les affaires de criminalité transfrontalière organisée, la synergie d’action est nécessaire pour pouvoir mettre la main sur les personnes suspectes. C’est aux justiciables de faire la saisine. Le cas de Bosso et Toumour ont été cités ou les différentes unités se complètent dans les missions d’opération ;
  • L’impossibilité de rendre compte au préalable d’une affaire par les FDS au PR, il faut notifier immédiatement au procureur tout acte pris.

La deuxième journée de l’atelier a débuté avec la lecture et l’amendement du rapport de la première journée. Après cela, trois communications ont été présentées.

Module de l’Assistance Juridique

Le module sur l’assistance juridique a été présenté par Monsieur ALI IBRAHIM, Directeur de Suivi et Evaluation à l’ANAJJ. Il a défini le concept de l’assistance juridique et a décliné les principales missions de l’ANAJJ que sont l’assistance juridique et l’assistance judiciaire. Le communicateur s’est appesanti d’abord sur l’assistance juridique et ses principales composantes dont entre autres : l’information, la sensibilisation, l’accueil, la consultation et l’orientation sur les droits et la justice. Il s’en est suivi les conditions d’accès et les domaines d’application de l’assistance juridique. Celle-ci est applicable à tous les domaines du droit et est gratuite et ouverte à tout le monde. Suite à cette présentation, des contributions et questions ont été enregistrées autour des points suivants :

  • Les prestations de l’agence à l’endroit des justiciables ;
  • les difficultés rencontrées par les BAJJ dans leurs fonctionnements ;
  • le manque de la visibilité de l’ANAJJ réduisant son efficacité ;
  • l’ancrage de l’ANAJJ dans les TGI.

Module de l’assistance judiciaire

Présenté par la DG de l’ANAJJ à travers une méthode participative, l’assistance judiciaire, contrairement à l’assistance juridique, garantit un procès équitable. Elle est aussi un ensemble des prestations au cours d’une procédure judiciaire. Il existe deux catégories d’assistance judiciaire : l’assistance sous condition d’indigence et l’assistance d’office. Les échanges ont porté sur :

  • les catégories de bénéficiaires d’une assistance juridique ;
  • la méconnaissance du certificat d’indigence ;
  • les conditions de retrait d’une assistance judiciaire :
  • la visibilité de l’ANAJJ ;
  • le rôle de la société civile ;
  • les défis liés aux missions de l’ANAJJ : insuffisance des ressources ; les allocations budgétaires sont très en deçà des missions assignées à l’institution ; difficulté de collaboration avec le barreau ; problème de collecte des données
  • la non présence des avocats dans les TGI de l’intérieur.

La dernière présentation de la journée a porté sur le plan d’action stratégique 2023-2027 de l’ANAJJ qui a été faite par Monsieur IBRAHIMA DANBADJI Daouda, Directeur des Ressources à l’ANAJJ.

Le plan stratégique de l’ANAJJ

Le communicateur a d’abord souligné que l’objectif du partage de ce plan stratégique est de porter à la connaissance des participants les objectifs stratégiques, missions et visions de l’ANAJJ de 2023 à 2027 ainsi que les rôles que les différents acteurs peuvent jouer dans l’atteinte de ces objectifs. Il ressort de cette communication trois axes stratégiques à savoir :

  • Objectif stratégique 1 : améliorer la gouvernance de l’agence pour lui permettre de jouer pleinement son rôle et assurer une meilleure coordination des interventions des partenaires ;
  • Objectif stratégique 2 : rendre disponible l’assistance juridique à tous, sans aucune distinction
  • Objectif stratégique 3 : Rendre l’assistance judiciaire accessible à tous les principaux bénéficiaires

Des programmes, actions et activités budgétisées sont liées à chaque axe stratégique. Le coût total du plan stratégique sur 5 ans est estimé à 5 485 900 000 fcfa.

Les échanges ont porté sur les faibles ressources allouées à l’ANAJJ, les facteurs de risque à la réalisation de ces objectifs, les facteurs de succès.

Recommandations et conclusion

Les participants ont formulé des recommandations à l’endroit :

  • des collectivités : s’assurer de l’effectivité de la délivrance du certificat d’indigence ; d’introduire la prise en charge judiciaire dans les PDC ;
  • de la société civile : contribuer à la vulgarisation du guide ; implication et collaboration pour contribuer à la visibilité de l’ANAJJ ;
  • de l’ANAJJ : d’organiser une table ronde pour la mobilisation des ressources avec les partenaires, travailler avec les radios communautaires afin de sensibiliser beaucoup de communautés sur l’existence de l’ANAJJ et les services qu’elle offre.
  • Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme : étant donné que les exactions sont les plus souvent commises par les hommes de rang au sein même des FSI, les participants ont demandé au Haut-commissariat de financer la vulgarisation du guide à l’endroit de ces hommes de rang.

Clôture

C’est par le mot du Représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme et celui de la Directrice Générale de l’ANAJJ que l’atelier a été clôturé. Le premier a félicité les participants pour la qualité des échanges et a remercié l’ANAJJ pour la franche collaboration. La DG a, à son tour, remercié les participants pour leur participation et a rappelé l’intérêt de ce guide pour la population et les FDS. Elle a invité la société civile à s’impliquer pour sa vulgarisation à l’endroit des populations pour un meilleur respect des droits de l’homme.

L’intervenante a réitéré ses remerciements à l’endroit du Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme pour l’appui financier qu’il apporte dans le cadre de l’assistance juridique. Elle a fini son mot en remerciant les participants de l’intérêt porté aux différentes communications et en leur souhaitant un bon retour dans leurs familles respectives. Elle n’a pas manqué de leur rappeler la nécessité de procéder à la restitution de ces formations à l’endroit de leurs structures respectives.