Le mardi 20 juin 2023, a débuté dans la salle de réunion du bureau du Comité d’Organisation Diffa N’GLAA, la formation de quinze (15) Défenseurs Commis d’Office (DCO) de la région de Diffa sur la procédure pénale sur le thème : « les actions nées de l’infraction : l’action publique et l’action civile ». 

Cette formation qui a duré trois (3) jours a regroupé :

  • 01 représentant de l’ANAJJ ;
  • 02 représentants du projet Adalci ;
  • 02 formateurs (tous magistrats) à savoir Monsieur Ali Ibrahim, Directeur de Suivi et Evaluation à l’ANAJJ, et Monsieur Habibou Mahaman, Président du TGI de Diffa ;
  • Neuf (09) DCO du TGI de Diffa ;
  • Trois (03) DCO du TI de N’Guigmi ;
  • Et trois (03) DCO du TI de Mainé Soroa

La première journée a débuté avec la cérémonie d’ouverture qui a été marquée par une fatiha prononcée par un participant, suivie de l’allocution du représentant du projet Adalci Mr Abdou Razak, qui a remercié les participants d’avoir répondu à son invitation, leur a souhaité la bienvenue et a exprimé le souhait de les voir attentifs à suivre l’exposé du module pour qu’à la fin, la formation puisse avoir un impact positif dans leur prestation.

C’est après que Mr Ali Ibrahim, Magistrat à l’ANAJJ a pris la parole pour annoncer le thème de la formation intitutlé : « les actions nées de l’infraction », thème subdivisé en deux sous thématiques à savoir : « l’action publique » et « l’action civile ».

Tout d’abord, la première sous thématique l’action publique a été présentée par Mr Habibou Mahaman, Président du Tribunal de Grande Instance de Diffa. Mais avant ladite présentation, un pré-texte a été donné aux participants afin d’évaluer leur connaissance avant la formation. Puis il a abordé la première sous thématique portant sur l’action publique.

  • L’action publique

Il a commencé par définir l’action publique comme la prérogative reconnue au ministère public d’agir au nom de la société face à une violation de la loi pénale, afin d’en appréhender les auteurs, de les traduire en justice, les juger et les condamner et réparer le préjudice causé par l’infraction à la victime. Il a ensuite évoqué les sujets actifs et passifs de l’action publique ainsi que les causes de son extinction.

  • Les sujets actifs de l’action publique

Ici l’action publique appartient à la société et doit d’être exercée à travers les représentants qualifiés qui sont les magistrats du Ministère Public, certaines administrations comme celles des eaux et forêts et des douanes. Il faut noter qu’à part les sujets ci-dessus cités, l’action publique peut aussi être mise en mouvement lors des infraction commises à l’audience, devant la chambre d’accusation, par la partie civile à travers une plainte avec constitution de partie civile moyennant une caution fixée par ordonnance du juge d’instruction lorsque le Ministère Public classe le dossier sans suite.

  • Les sujets passifs

Ils sont définis comme ceux contre lesquels l’action publique est exercée. Il s’agit de l’auteur et ou du complice de l’infraction, du représentant légal d’une personne morale, des personnes pénalement responsables du fait d’autrui. Ici le présentateur a donné des exemples et a partagé des expériences vécues sur le terrain.

  • L’exercice de l’action publique

Elle appartient d’abord aux magistrats du Parquet. Sous la direction du Procureur de la République, les magistrats du parquet apprécient la légalité, la recevabilité de l’action publique et décident de poursuivre s’il y a lieu, car l’opportunité de poursuite leur appartient.

  • Le principe de l’opportunité de poursuite

Ici le présentateur a expliqué que le Procureur de la République peut toujours revenir sur la question tant que l’action publique n’est pas éteinte.

  • Les limites au principe de l’opportunité de poursuite

La liberté de décision du Procureur comporte deux limites. En effet, il a obligation de poursuivre dans certains cas et en est empêché dans d’autres. Des exemples illustrant ces limites ont été donnés par le présentateur en ces termes :

  • Il a l’obligation d’agir quand c’est un ordre écrit du supérieur hiérarchique qui lui est adressé, quand il y a plainte avec constitution de partie civile et en matière de lutte contre la corruption.
  • Il a l’interdiction d’agir quand il y a des immunités (diplomatique, familiale), lorsqu’une plainte de la partie lésée est nécessaire (adultère, diffamation), en cas de nécessité d’une autorisation préalable ou d’un avis lié, en cas de nécessité d’une mise en demeure ou de résolution d’une question préjudicielle.

Des discussions enrichissantes sur les sujets actifs et passifs ont été tenues et des exemples ont été donnés.

  • L’exécution de la poursuite

Elle se traduit par la saisine d’une juridiction de jugement ou l’ouverture d’une information suivant un mode de saisine déterminé par la loi. Le code de procédure pénale retient :

  • Le flagrant délit ;
  • La citation directe ;
  • L’information ;
  • La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ou le plaider coupable.
  • L’extinction de l’action publique

Le formateur a expliqué que l’existence de l’action publique est non seulement liée à sa mise en mouvement, mais aussi à ce qu’elle ne soit pas préalablement éteinte. Il existe plusieurs modes d’extinction de l’action publique pouvant elle-même être liée à des causes diverses et variées. Parmi ces causes, les unes sont générales et sont énumérées par la loi et notamment l’article 6 alinéa 1er du code de procédure pénale. Il s’agit de la mort du prévenu, la prescription, l’amnistie, l’abrogation de la loi pénale et la chose jugée. Les autres considérées comme particulières s’appliquent à certaines infractions spécifiques : ce sont la transaction, le désistement, la renonciation ou le retrait de plainte de la victime.

Des éclaircissements sur les causes particulières et des exemples ont été fournis par le formateur sur l’adultère, l’abandon de foyer ou la diffamation.

Des discussions se sont poursuivies sur la détention préventive, la prescription des faits, l’extinction de l’action publique, les limites des pouvoirs des OPJ, la différence entre la police administrative et judiciaire, les infractions commises lors des audiences, le non-lieu… etc.

L’intervenant Mr Habibou Mahaman précisait enfin que l’action publique reste le maitre-mot en matière de procédure pénale. C’est de la commission d’une infraction à la loi pénale que s’ouvre à quiconque en aurait souffert, le droit de demander réparation.

La deuxième journée a débuté avec la présentation du rapport de la 1ère qui, après correction et amendement, a été adopté. Après quoi, le deuxième formateur monsieur Ali Ibrahim a pris la parole pour exposer sur l’action civile.

  • L’action civile

Ici aussi, un prétest a été donné aux participants sur l’action civile afin de les évaluer en amont. De prime abord, le formateur a défini l’action civile comme l’action en réparation du dommage causé par l’infraction. Elle comporte aussi les sujets actifs et les sujets passifs. Tout en adoptant la méthode participative, il a expliqué tour à tour les notions de sujets actifs et passifs de l’action civile.

  • Les sujets actifs

Il s’agit des demandeurs à l’action civile, soit la victime soit ses héritiers.

L’art.2 du CPP dispose à cet effet que : « l’action civile appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ».

Il faut noter que l’action civile comporte quatre conditions pour sa mise en œuvre à savoir :

  • la certitude du préjudice causé ;
  • le préjudice doit être lié à une infraction pénale punissable ;
  • l’exigence d’un préjudice direct ;
  • l’exigence d’un préjudice personnel.

Chacune de ces conditions a été expliquée dans son contenu et sa signification par l’exposant, qui a ensuite abordé les sujets passifs de l’action civile.

  • Les sujets passifs

Ici il s’agit des défenseurs à l’action civile, précisément le délinquant, ses héritiers et les personnes civilement responsables.  Il faut noter que le but de l’action est la réparation du préjudice causé par l’infraction.

A ce niveau aussi, des échanges ont eu lieu entre les participants et des exemples ont été donnés à titre d’illustration.

Ensuite l’intervenant a poursuivi son exposé en évoquant les garants du délinquant qui sont :

  • les civilement responsables du délinquant ;
  • l’assureur du délinquant ;
  • l’administration.

Des exemples ont été évoqués concernant des cas de partage de responsabilité entre les assureurs dans des circonstances d’accident de la circulation, occasionnant des blessures ou homicides involontaires. En outre, des questions ont été posés sur les cas de détournement des deniers publics auxquelles le présentateur a apporté des réponses avant de suspendre la séance pour le jour suivant.

La troisième journée a débuté avec la présentation du rapport du jour, qui après correction et amendement, il a été adopté.  Le formateur a poursuivi son exposé sur l’extinction de l’action civile.

  • L’extinction de l’action civile

A ce propos, il a expliqué qu’ici l’action civile va disparaitre indépendamment de l’action publique. Elle va s’éteindre selon les mécanismes du droit civil par voie principale et par voie accessoire suivant cinq modes à savoir :

  • lorsque le responsable paie lui-même ses dettes ;
  • si la victime renonce à demander réparation du préjudice avant la mise en mouvement de l’action publique ;
  • si la victime transige avec le responsable ou trouve un accord pour mettre fin au litige ;
  • si la partie civile acquiesce ou renonce aux voies de recours ;
  • l’autorité de la chose jugée.

Des questions ont été posées par les participants sur le fondement de la demande de réparation que les avocats formulent pour le compte des victimes mineurs qu’ils assistent, sur les dommages et intérêts, sur la responsabilité des agents publics dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ; à toutes ces questions, le présentateur a fourni des réponses satisfaisantes.

Des explications ont été aussi données sur la renonciation expresse et tacite de l’action civile.

Ensuite, des exercices pratiques ont été donnés aux participants dont les deux premiers concernent l’action publique quant aux les personnes qui peuvent l’exercer, la prescription et l’extinction de l’action publique. Le troisième concerne l’action civile concernant la réparation du préjudice matériel et moral.

Enfin des discussions sur les amendes civiles pénales ont permis de clôturer la séance.

La formation s’est bien déroulée et a permis aux DCO de mieux cerner ces notions de procédure pénale.